Éphésiens (1)

L’épître de Paul aux Éphésiens (Un aperçu)

On ne tarit pas d’éloges sur la lettre de Paul aux Éphésiens. Elle s’ouvre sur une doxologie, une « eulogie » (à laquelle il consacre 12 versets dans le premier chapitre – versets 3 à 14), se poursuit en illuminant nos cœurs et nos âmes et se referme par une bénédiction. N’est-ce pas là l’ordre d’une vraie adoration aimée de Dieu et qui lui rend gloire !

Appelée à juste titre : la couronne des Écrits de Paul, la reine des épîtres, le Saint des saints des épîtres pauliniennes, la quintessence paulinienne ; l’épître de l’ascension (après avoir été ravi jusqu’au troisième ciel – dans les lieux célestes est une expression qui lui est unique et qui revient cinq fois – 1:3 ; 1:20 ; 2:6 ; 3:10 ; 6:12), les Alpes du Nouveau Testament ; l’épître de l’église (imagée comme étant le Corps de Christ – 1:22-23 -, le Temple du Seigneur – 2:20-22 – et son Épouse – 5:25-32) ; le Cantique des cantiques du Nouveau Testament (à cause de son contenu poétique). En effet, c’est l’épître de la grâce (mot qui y revient 12 fois) qui l’environne de tous côtés (1:2 ; 6:24), car nous sommes sauvés par grâce (2:8-10). C’était la lettre favorite de Calvin, d’Adolphe Monod, de Chrysostome, j’en passe.

Si Romains nous expose la nécessité de la foi ; Hébreux la supériorité de la foi ; Galates, la liberté de la foi ; Jacques, la libéralité de la foi ;  Éphésiens exhibe la prospérité ou les richesses de notre foi en Christ. C’est d’ailleurs le titre que je voudrais donner à cette étude : LA PROSPÉRITÉ DU CHRÉTIEN EN CHRIST. Par sept (7) fois, Paul parle des richesses de notre héritage en Christ, pour nous rappeler que comme chrétiens, nous n’avons rien à envier au monde. En effet, nous avons tout pleinement en lui :

« Béni soit Dieu, le Père de notre Seigneur Jésus Christ, qui nous a bénis de toute sortes de bénédictions spirituelles dans les lieux célestes en Christ ! » (1:3).

« En lui nous avons la rédemption par son sang, la rémission des péchés, selon la richesse de sa grâce que Dieu a répandue abondamment sur nous par toute espèce de sagesse et d’intelligence… » (1:7-10).

« En lui nous sommes aussi devenus héritiers, ayant été prédestinés suivant la résolution de celui qui opère toutes choses d’après le conseil de sa volonté » (1:11).

« En lui vous aussi, après avoir entendu la parole de la vérité, l’Évangile de votre salut, en lui vous avez cru et vous avez été scellés du Saint Esprit qui avait été promis, lequel est un gage de notre héritage, pour la rédemption de ceux que Dieu s’est acquis, à la louange de sa gloire » (1:14).

« … et qu’il illumine les yeux de votre cœur, pour que vous sachiez quelle est l’espérance qui s’attache à son appel, quelle est la richesse de la gloire de son héritage qu’il réserve aux saints, (1:18)

« … afin de montrer dans les siècles à venir l’infinie richesse de sa grâce par sa bonté envers nous en Jésus Christ » (2:7).

« A moi, qui suis le moindre de tous les saints, cette grâce a été accordée d’annoncer aux païens les richesses incompréhensibles de Christ » (3:8).

Quand et où ?

Éphésiens fut écrite par Paul (aucune raison d’en douter) au cours du 1er de ces deux emprisonnements à Rome vers l’an 62. Il se nomme à deux reprises (1:1 ; 3:1), et rapelle qu’il est en prison (3:1 ; 4:1 ; 6:20) . Avec Colossiens, Philémon et Philippiens, elle fait partie des « lettres de prison ». Il n’est pas nécessaire de spéculer sur le fait que des copies anciennes circulaient, sans la mention « à Éphèse ». Peu importe ! Tychique (6 :21 ; 2 Timothée 4:12) qui en était le porteur devait à chaque fois mettre à la place des pointillés le nom de l’église dans laquelle elle devait être lue. Il est fort probable que la lettre ait été lue à Laodicée et Hiérapolis (1:13-15 ; 2:21 ; 6:21 ; Colossiens 2:2-3). Ce qui en fait une lettre pour toutes les églises d’hier, d’aujourd’hui et de demain. Comme toute la Bible, elle fut écrite pour s’adresser à tous et à toutes les églises.

La ville d’Éphèse était affublée du surnom de « lumière » et de « banque de l’Asie » avec une population de plus de 300. 000 âmes. Ce n’est pas pour rien que Paul met en relief le fait que notre vraie banque, nos vraies richesses sont celles que nous avons en Christ (1:3). En plus de ses richesses matérielles, de ses érudits et autres philosophes qui en avaient fait leur lieu de prédilection (pour aguicher les foules), la ville d’Éphèse était réputée pour sa culture, son occultisme, son immoralité et son idolâtrie. En plus du culte rendu à l’empereur, Éphèse était le sanctuaire de la déesse Diane ou Artémis (déesse dénudée de la nature, de la fertilité et de la prostitution – pratique faisant partie du culte) dont le temple devint par la suite l’une des 7 merveilles du monde. Beaucoup convergeaient vers Éphèse en pèlerinage pour l’adorer et acheter des babioles et autres idoles à son effigie. D’où l’exhortation de Paul dans Éphésiens 5:1-21 « … vous êtes lumière dans le Seigneur. Marchez comme des enfants de lumière » (5:8). Les Éphésiens se vantaient d’abriter ce temple soutenu par 117 piliers de près de 20 m, de marbre plaqués d’or fin. Et à Paul de leur dire qu’il n’y a pas « photo » car l’Église du Dieu vivant est la colonne et l’appui de la vérité (1 Timothée 3:14-15). Il ne dit pas que l’église est la vérité (elle en est la colonne et l’appui), car Christ est la seule vérité. Dès qu’une église cesse de proclamer la vérité de Christ, elle cesse de l’être. C’est un oxymore de dire qu’une église est morte. Si elle appartient à Christ, elle vit car il en est la Tête, le Chef étant vivant pour toujours.

L’église à Éphèse : Fondée par Paul avec la collaboration d’Aquila, Priscille (Actes 18:19-21) et Apollos (Actes 18:24-28) vers la fin de son 2è voyage missionnaire après 18 mois passés à Corinthe. Il y effectua dans un premier temps une visite de courte durée (Actes 18:18-21) suscitant l’intérêt de plusieurs Juifs, avant d’y revenir et d’y poser ses valises pour 3 ans. Le compte-rendu circonstancié de sa mission se trouve dans Actes chapitre 18 à 20. Comme résultats de l’œuvre à Éphèse :

– Plusieurs Grecs et Juifs vinrent à la foi dont les 12 disciples de Jean Baptiste (Actes 19:1-7) pour rappeler que le salut ne se trouve qu’en Christ seul et non dans un rituel, une cérémonie, une religion ou une tierce personne.

– L’Évangile s’est répandu dans toute l’Asie au moyen de l’école biblique d’un nommé Tyrannus. Ceci nous montre la méthode de Paul. Après avoir prêché l’évangile, il faut aussi enseigner, former et envoyer en mission les disciples. Cette école biblique dirigée par le plus grand des apôtres dura 2 ans et n’avait pas eu pour but de former des grosses têtes, mais des missionnaires (Actes 19:8-10) pratiques.

– Des exorcistes vinrent à la foi et brûlèrent leurs livres magiques (Actes 19:17-20). Ils ont prouvé par cela leurs bonnes dispositions et leur engagement à rompre avec le passé.

– Un grand manque à gagner pour les fabricants d’idoles. Ils furent acculés à la faillite. Quand on touche aux intérêts commerciaux et religieux des hommes, ils s’en prennent à vous.

– Une forte église prospère s’y établie. Une église à laquelle Paul donna de fortes recommandations car les loups pervers et pernicieux n’épargneront point le troupeau de Dieu (Actes 20:17-38). Heureusement que Dieu protège les siens !

Timothée (fils dans la foi de Paul) en deviendra le pasteur (1 Timothée 1:3). L’apôtre Jean y mourra. Éphésiens est aussi l’une des 7 églises de l’Apocalypse à laquelle Jésus s’adressa directement par le canal de l’apôtre Jean. Selon toute vraisemblance, elle devint la porte d’entrée de l’Évangile aux autres provinces d’Asie mineure, même si les loups cruels étaient déjà aux portes, et agissaient d’où l’appel à la repentance, au rappel et à refaire leurs premières œuvres afin de redorer leur blason et retrouver leur premier amour.

Contenu : Malgré sa brièveté (6 chapitres), Éphésiens prend en compte tout le champ de notre foi, et bob nombre de doctrines y reviennent : la Divinité et le rôle de chaque personne de la sainte Trinité, la prédestination (il n’y a rien de guindé dans ce mot), l’élection (rien non plus de desséchant), la grâce irrésistible, la persévérance des saints, l’unité des croyants dans un seul corps, la responsabilité des uns envers les autres, la vie familiale et parentale, le combat spirituel… Pour bien en saisir le contenu, il serait judicieux et souhaitable  de la lire avec Colossiens avec laquelle elle a beaucoup en commun (et qui en est presqu’un extrait). Les 155 versets se divisent en 2 sections :

1ère section chapitres 1-3 : partie doctrinale ou didactique afin d’encourager et fortifier la foi des croyants. Non mes frères, la doctrine n’a rien d’assommant, elle est vivante car les paroles de notre Seigneur sont Esprit et Vie. Celui qui n’aime pas la doctrine a un sérieux problème spirituel (sans oublier que celle-ci doit s’enseigner avec amour et dans la vérité biblique).

2ème section chapitres 4-6 : partie pratique. Cette section parle de la marche et du combat chrétien. Paul y brosse 8 aspects de notre marche (prochaine étude). C’est le modèle de Paul. Il n’y a pas de dichotomie entre la doctrine et l’éthique. Loin de se contredire, Romains, Galates et Jacques se complètent. Les dogmes n’ont leur valeur que dans la pratique. Celui qui limite sa foi chrétienne à des dogmes tombe à coup sûr dans le fanatisme. La saine doctrine débouche toujours sur une sainte pratique. Nous avons des droits et des devoirs, des privilèges et des responsabilités. Sauver pour servir !

Finalement : Qui sont les lecteurs et récipiendaires de cette épître ? Ils nous sont décrits comme étant :

– Des saints : le mot « saint » revient 9 fois (1:1, 15, 18 ; 2:19; 3:8, 18 ; 4:12 ; 5:3 ; 6:18) dans la lettre. Des saints à Ephèse (une ville immorale) et pas à titre posthume ! Des saints dans un monde pervers où le mal est qualifié de bien et inversement. Ces croyants n’ont pas eu à attendre d’être canonisé ou béatifier ou de devenir membres d’une élite, d’une confrérie ou d’une classe. Un saint c’est quelqu’un qui connaît Jésus-Christ comme Seigneur et Sauveur. Une fois sauvé, une fois en Christ, le chrétien est sanctifié, mis à part, appelé de Dieu, aimé et gardé pour Jésus-Christ (Hébreux 10:10 ; 2 Thessaloniciens 2:13). Ce que Dieu veut, c’est notre sanctification (1 Thessaloniciens 4:3). Vivants ou morts, on ne s’appartient plus. Séparés pour lui de ce monde, la différence est notre marque divine officiellement déposée. Différence(MD). On peut aussi substituer le mot disciple au mot saint (Actes 9). D’ailleurs avant de porter le nom de chrétiens, ils étaient appelés : peuple de la voie (Jésus étant le chemin), les disciples et les saints. Tout chrétien est un saint pécheur pardonné. N’est-ce pas merveilleux !

– Des fidèles : La définition de « fidèle » se trouve dans le mot lui-même. Fidèle signifie plein de foi (fide en latin) à l’exemple de Barnabas qui  « était un homme de bien, plein d’Esprit Saint et de foi » (Actes 11 :24) ; à l’exemple de Lydie : « Si vous me jugez fidèle au Seigneur, entrez dans ma maison, et demeurez-y » (Actes 16:15). Elle n’a pas eu à attendre des années pour faire preuve de sa fidélité. « Quand ils [Paul et Silas] furent sortis de la prison, ils entrèrent chez Lydie ». On ne devient pas saint parce qu’on est fidèle, mais un saint ne peut l’être sans être fidèle. Ces deux amis sont inséparables. Etre fidèle, c’est aussi être fiable. Peut-on compter sur nous ? Jésus est fidèle, soyons aussi fidèles à lui et à son église. La loyauté est une vertu.

À Éphèse : lieu géographique. Les chrétiens authentiques se réunissent dans un lieu bien précis. Il n’y a pas de chrétien insulaire qui ne vit sa foi que pour lui comme il n’y a pas de chrétien « papillon » qui fait le touriste d’une église à une autre. L’église locale est le lieu à partir duquel le chrétien est enseigné, c’est là qu’il exerce ses dons et talents spirituels et c’est aussi là que le Seigneur béni ses enfants et son œuvre.

– En Christ : une expression qui revient plus dune vingtaine de fois sur les 150 que compte le Nouveau Testament. En lui, pour Christ, par Christ, reviennent une bonne cinquantaine de fois. C’est de lui que parle cette épître. Le chrétien est assis dans les lieux célestes car sa vie est cachée en Christ (Colossiens 3:5). Les Juifs étaient fiers d’être en Abraham. Jésus leur dit qu’ils avaient pour père le Diable. Les hommes de ce monde sont en Adam comptant sur leurs bonnes œuvres, mais le chrétien est en Christ et Dieu est son Père. Nous demeurons en Christ, identifiés et unis à lui. En Christ, nous sommes une race élue (1 Pierre 2:9). Dans Colossiens, Christ est en nous, mais dans Éphésiens, nous sommes en Lui. Nous avons communion avec lui, car sans lui, nous ne pouvons rien faire.

Celui qui répond à ces 4 éléments est un saint et il en résulte qu’être chrétien, c’est faire partie d’une race élue, un peuple (les versets 3 à 14 du chapitre 1 constituent une seule phrase en grec. Paul était si émerveillé de la grandeur de Dieu qu’il eut du mal à s’arrêter) :

1. Béni de toute éternité (v3). Toutes les richesses et les provisions de ce monde ne sauraient surpasser les bénédictions spéciales que nous avons en Christ.

2. Élu par le PÈRE avant la fondation (la création) du monde. Ce fut son choix souverain, et cela suffit (v4). La brebis perdue n’ira jamais à la recherche de son berger, c’est l’inverse. Celui qui s’est lui-même choisi, retournera vite sa veste à la première difficulté, mais puisque c’est Lui qui nous a élus, il est Tout-Puissant pour nous garder.

3. Adopté et accepté pour ne jamais être rejeté (v5). Jésus est le Fils de Dieu par nature, nous sommes ses enfants par adoption.

4. Accepté « en son bien-aimé » (v6). Il n’est plus question de passer par un quelconque protocole. Autre que Christ, aucun homme, prêtre, sacrificateur, religieux ne doit servir de médiateur ou d’intermédiaire. Il nous suffit entièrement. Christ est le bien-aimé du Père, à notre tour, nous devenons ses bien-aimés.

5. Racheté par le FILS selon le bon plaisir de Dieu et non le nôtre ou suite à notre décision (v7). Nous étions sur le marché des esclaves et Christ nous a rachetés en s’acquittant du prix à payer. Christ a versé son sang précieux pour nous libérer des chaînes du Diable.

6. Pardonné une fois pour toutes, donc réellement libres car le Fils nous a affranchis (v7). Nous bénéficions d’un « non lieu » (plus fort que l’acquittement) et dégagés de toutes les charges qui pesaient sur nous. Justifiés, juste comme si nous n’avions jamais commis la moindre faute.

7. Héritier de tout ce qui appartient au Seigneur (v11) ;

8. Croyant (v13). L’incroyant ne saurait plaire à Dieu (Hébreux 11:6).

9. Scellé et acquis (v14) par le SAINT-ESPRIT et tout cela pour sa seule gloire et allant vers la bonne destination (1 Pierre 2:9). Nous sommes donc sa propriété.

En terminant, Éphésiens présente un vibrant contraste entre la vie de l’homme heureux et celle du pécheur du Ps 1:1 : marche, arrêt, assis… La voie des pécheurs mène à la ruine. Quant au saint, dans Éphésiens, il est : assis (2:6) ; il peut marcher (4:1-2) et il peut tenir ferme (debout pour combattre) 6:11. Voilà notre ordre de ralliement. Assis avec Christ, nous pouvons marcher et tenir ferme contre les ruses du Diable.

Nous faisons la même prière que l’apôtre : « … que le Dieu de notre Seigneur Jésus-Christ, le Père de gloire, vous donne un esprit de sagesse et de révélation, dans sa connaissance, et qu’il illumine les yeux de votre cœur, pour que vous sachiez quelle est l’espérance qui s’attache à son appel, quelle est la richesse de la gloire de son héritage qu’il réserve aux saints, et quelle est envers nous qui croyons l’infinie grandeur de sa puissance, se manifestant avec efficacité par la vertu de sa force » (1:17-19).